Saison de reproduction 2005
  • Vautours fauves

La saison de reproduction pour cette espèce a été très bonne avec, pour la première fois depuis le début de la réintroduction en 1981, plus d’une centaine de jeunes à l’envol ! (106) A l’heure actuelle, une estimation située entre 130 et 140 couples de vautour fauves pour les Grands Causses semble fondée.

Paramètres de reproduction de la colonie de vautours fauves en 2005 :

  • Global : 0,73 (0,72 en 2004)
  • Gorges de la Jonte : 0,80 (0,64 en 2004)
  • Gorges du Tarn : 0,73 (0,75 en 2004)
  • Vallée du Tarn : 0,55 (0,88 en 2004)

    Evolution depuis 1990 :

Le succès de reproduction global est tout à fait bon pour cette espèce et semble se stabiliser depuis le début des années 2000 autour de 0,70 jeune produit par tentative de reproduction. Actuellement, il y a 230 nids répertoriés ayant au moins accueilli une ponte de vautour fauve depuis le début du programme : 103 dans les gorges de la Jonte, 103 également dans les Gorges de Tarn, 22 dans la Vallée du Tarn et 2 dans les Gorges de la Dourbie.

  • Baguage des jeunes

Le baguage des jeunes vautours au nid s’est déroulé du 19 avril au 12 juin 2005. Cette opération a nécessité 24 journées de travail et a permis de baguer 85 jeunes vautours fauves. Pendant 9 jours, 4 personnes ont opéré à 2 équipes. L’équipe de bagueurs était cette année encore composée des personnes suivantes : Jean-Louis PINNA (bagueur du CRBPO), Bruno DESCAVES, Jean-Pierre MALAFOSSE et Patrice MARTIN pour le Parc national des Cévennes (PNC), et Philippe LÉCUYER (bagueur du CRBPO) pour la Ligue pour la Protection des Oiseaux (antenne Grands Causses).

Nous profitons de ces quelques lignes pour tirer un coup de chapeau à Jean-Louis Pinna qui a pris sa retraite à la fin de la saison de baguage 2005 des petits vautours caussenards. Jean-Louis les a bagués au nid dans les grandes falaises caussenardes depuis le début des reproductions et a su allier rigueur et poésie dans cette mission souvent délicate et parfois périlleuse… C’est désormais en bénévole qu’il continuera, nous l’espérons le plus longtemps possible, à arpenter les parois des Gorges du Tarn ou de la Jonte à la recherches des passages menant aux nids des petits bouldras !

  • Juvéniles récupérés affaiblis après envol

Le Chaque année, un certain nombre de juvéniles sont récupérés affaiblis après leur départ du nid. Dans certains cas, la cause en est l’inexpérience ou la malchance pour l’oiseau.
Les phénomènes dits de tournis (crises nerveuses pouvant entraîner la mort) s’ils ont été vus sur des oiseaux adultes, s’observent tout de même le plus souvent sur des vautours juvéniles et ce pendant la période post-envol. Si la piste des antiparasitaires pour les brebis (organophosphorés) ne doit pas être écartée, il semblerait plutôt que nous assistions à l’installation de paramètres de régulation de la population, paramètres liés à l’accès aux ressources trophiques.
L’hypothèse pourrait être que certains couples, formés de jeunes adultes, n’accèdent pas toujours aux ressources alimentaires (quantitativement et qualitativement). Des carences (notamment en vitamines du groupe B, se trouvant dans les abats comme le foie par exemple) pourraient alors influer sur les conditions de l’envol des poussins élevés par ces couples immatures. Ce serait alors, en partie, ces jeunes que nous retrouvons affaiblis et qui parfois meurent de ces crises nerveuses !
Il faut toutefois préciser que ces crises de tournis, observées depuis déjà pas mal de temps sur ce programme, si elles ont une incidence sur les taux de survie de ces juvéniles, ne semblent pas affecter la dynamique de cette population de vautours fauves qui montre des effectifs reproducteurs toujours en hausse !

En 2005, sur plus de 25 cas signalés pendant l’été, notamment au mois d’août, 19 jeunes vautours de l’année ont ainsi été récupérés soit en difficulté soit complètement affaiblis. La plupart d’entre eux ont été relâchés après un court séjour en volières ou au centre de soins de l’UNCS à Millau.

  • Suivi individuel par lecture de bagues

En 2005, ce sont 428 vautours fauves qui ont été identifiés par lecture de bague. Ces identifications se font pour l’essentiel lors de la prise de nourriture pendant les curées. Comme le montre le graphique ci-dessous, la proportion d’oiseaux endogènes (nés dans la colonie) est toujours prépondérante. En revanche, le nombre de vautours dits fondateurs est quant à lui en logique diminution, certains de ces oiseaux étant âgés de plus de 30 ans... Toutefois, encore 21 de ces précurseurs sont encore présents et certains se reproduisent toujours !

  • Exogènes controlés dans les Grands Causses

Comme l’année dernière avec les 2 vautours portugais, une nouvelle provenance a été mise en évidence grâce au suivi pendant les curées des individus marqués, il s’agit de 2 oiseaux croates (dont un de la colonie de l’île de Cres) ! Les 2 oiseaux sont des immatures d’un an et ont été également identifiés sur les programmes du sud des Alpes !

Pour l’année 2005, au moins 30 vautours fauves différents dits exogènes ont été contrôlés par lecture de bagues. (6 des Baronnies, 4 du Verdon, 3 du Vercors, 5 des Pyrénées, 1 du Portugal, 9 d’Espagne et 2 croates !) L’Europe des vautours est bien en marche !

  • Vautours moines

Saison de reproduction 2005

Cette année, ce sont 17 couples qui ont été dénombrés dans les Grands Causses. Treize ont pondu et deux couples ont déposé une ponte de remplacement. En 2005, 5 jeunes vautours ont pris leur envol. Le succès de reproduction, légèrement plus faible que l’année dernière, est de : 0,33 (Il était de 0,36 en 2004)


Comme le montre le graphique si dessus, si le nombre de couples va croissant depuis 1996, en revanche, le succès de reproduction ne suit pas la même tendance. En 10 années, et sur 70 tentatives de reproduction dans les Grands Causses depuis 1996, 28 jeunes vautours moines caussenards se sont envolés sur ce programme. (succès de reproduction moyen de 0,40)
Les 5 poussins produits in natura en 2005 ont été bagués à l'aire par Jean-Louis Pinna (PNC), Bertrand Eliotout et Philippe Lécuyer (LPO).

Evolution des effectifs

En 2005, le nombre de vautours moines identifiés avec certitude est légèrement inférieur à l’année précédente. En effet, ce ne sont que 32 oiseaux qui ont été contrôlés par lecture de bagues. Sur ce total, plus de 56% des oiseaux contrôlés sont des jeunes nés dans les Causses et les 43% restant sont des fondateurs.
En 2005, aucun nouvel oiseau n’a été lâché dans les Grands Causses. En revanche, les premières libérations ont eu lieu dans la région des Gorges du Verdon, dans les Alpes de Haute Provence, faisant suite aux lâchers effectués dans les Baronnies (Drôme) en 2004. Toutefois, une troisième et dernière chance a été donnée pour le vautour moine nommé Picasso.
Pour rappel, ce vautour est lâché sur le programme caussenard une première fois le 21 mai 2004. Quelques jours plus tard, il est capturé affaibli dans la région de Montauban (82) ! Le 22 novembre 2004, un second lâcher est tenté… sans succès pour l’oiseau qui est récupéré de nuit… après 3 semaines de galère dans les Gorges du Tarn. Après un séjour de 9 mois en volière où il se refait un plumage correct, il est donc relâché pour la troisième fois le 13 septembre 2005. Visiblement, cette dernière tentative est la bonne et il est régulièrement observé sur le site depuis cette troisième libération, participant régulièrement aux curées sur les charniers ! 

  • Vautours percnoptères

Pour la quatrième année consécutive, 2 couples de ce petit rapace nécrophage étaient présents dans la région. Malheureusement, seul l’un d’eux était reproducteur mais en revanche, il menait deux beaux jeunes jusqu'à l’envol !

Site n°1 :
Le couple a pondu vers le 13 avril 2005. Le 27 mai, le premier poussin semble né. Le 08 juillet, un deuxième jeune est présent ! Le premier s’envole le 17 août suivi de son cadet 4 jours plus tard. Les poussins n’ont pas été bagués au nid cette année.

Site n°2 :
Le deuxième couple est présent dès le 04 avril sur le site, sans toutefois donner de suite. Jusqu’au 02 mai, les 2 individus sont présents dans l’aire de l’année dernière et semblent s’occuper du nid. Ensuite, le site est abandonné… Y a-t-il eu des dérangements suite au passage de parapentes ? Dans tous les cas, le couple situé plus en amont et qui s’est reproduit avec succès n’a pas souffert de cette activité et aucun dérangement n’a été noté par le surveillant qui faisait le suivi de manière quotidienne.




Saison de reproduction 2004
  • Vautours fauves

La saison de reproduction 2004 enregistre une très légère baisse du nombre de jeunes produits. Cependant, le succès de reproduction global de 0,72 jeunes produits par couple est tout à fait normal pour cette espèce. Le suivi des nids, réalisé du mois de décembre au mois de juillet en collaboration étroite avec des agents du Parc national des Cévennes, a permis d’estimer la population reproductrice entre 115 et 120 couples pour 118 pontes déposées. Le nombre de jeunes à l’envol est de 85 contre 87 en 2003.

Nouveaux secteurs de nidification :

En 2004, aucun nouveau secteur de nidification n’a été découvert.
Les 2 nids de vautours fauves découverts en 2003 dans les Gorges de la Dourbie par Jean-Louis Pinna, agent de terrain du PNC, n’ont pas été occupés cette année. L’année dernière, sur ces 2 nids, seul un jeune avait pris son envol. Nous ne pouvons apporter d’explication à ce phénomène et les années futures nous apporteront la suite de cette éventuelle colonisation.

Actuellement, les colonies de vautours fauves des Grands Causses se localisent comme cela :

  • Gorges de la Jonte, adret et ubac. Occupées depuis le début de la réintroduction en 1981.
  • Gorges du Tarn, essentiellement leur partie méjanaise. Occupées depuis 1985.
  • Vallée du Tarn, occupée depuis 1999.
  • Gorges de la Dourbie, 2 nids en 2003.

Deux vautours portugais ont été identifiés cet été. Ces observations constituent une première pour la colonie des Grands Causses.

  • Vautours moines

Commencée en 1992, la réintroduction de cette espèce a pris officiellement fin en 2004 avec la libération des 4 derniers oiseaux. Au total, se sont donc 53 vautours moines qui ont été lâchés dans le cadre de ce programme. Depuis 1996, année de la première reproduction dans la nature en France, 22 jeunes ont pris leur envol. Si l’on rajoute un oiseau venu s’intégrer spontanément, et que l’on retire les vautours moines connus comme morts, la population caussenarde de cette espèce devrait compter 65 oiseaux. A l’heure actuelle, 37 vautours moines ont été identifiés en 2004 avec certitude par lecture de bague, soit près de 57% de l’effectif théorique.





Le suivi de la reproduction a permis de recenser entre 12 et 13 couples dont 11 reproducteurs. Ces 11 pontes n’ont malheureusement donné que 3 jeunes à l’envol. Des chutes accidentelles du nid sont très certainement la cause de ces 3 échecs à l’élevage. En effet, sur un des trois sites, le jeune a été retrouvé mort à une quinzaine de mètres de l’arbre ou se trouvait le nid et sur un autre, le nid était dans un très mauvais état. Comme les observations sur le terrain l’on démontré pour le vautour fauve, des visites d’individus (autres que les parents) peuvent occasionner ce genre de problème, de plus, vers l’âge de 3 mois, le jeune vautour reste seul à l’aire et une de ces visites peut très bien mal tourner…


Jean-Louis Pinna lors du baguage d'un jeune vautour moine (photo : P. Lécuyer ©)
  • Vautours percnoptères

Pour la troisième année consécutive, 2 couples ont tenté une reproduction dans notre région. En quelque-sorte, c’est une bonne nouvelle, qu’il faut toutefois tempérer car le succès de la reproduction est malheureusement très faible. En effet, depuis 2002, sur 6 pontes déposées par ces 2 couples, seulement 2 jeunes se sont envolés…


Jeune percnoptère venant d'être bagué au nid (photo : P. Lécuyer ©)


Le baguage des vautours caussenards

Dans le cadre du vaste programme de réintroduction du Vautour fauve dans la belle région des Grands Causses (sud du Massif Central), tous les vautours lâchés entre 1981 et 1986 ont été marqués. Chaque oiseau libéré fut équipé d’une bague de référence métallique et d’une bague en plastique codée, permettant avec du matériel optique l’identification à distance de chaque individu. Ces bagues d’identification, fournies sous la responsabilité de Guy Jarry du CRBPO permettent encore aujourd’hui de connaître par exemple l’effectif minimum de vautours présents dans la colonie caussenarde. Dans ce contexte de réintroduction, il est aisé de comprendre l’intérêt de vérifier avec précision la présence ou l’absence des oiseaux lâchés, toutefois nous verrons plus loin les autres possibilités qu’offrent ces identifications.
Rapidement, les premiers poussins naissaient libres dans cette nouvelle colonie unique en son genre car réintroduite ! Il paraissait évident que marquer ces jeunes vautours, porteurs de tant d’espoir, apporterait des informations précieuses. Seulement, comme tout le monde le sait, cette espèce niche en falaise et pour ceux qui connaissent les parois calcaires des Gorges de la Jonte ou du Tarn, un problème sérieux d’accès aux nids se posait.

Un homme, une mission


Jean-Louis Pinna avec un vautour moine (photo : P. Lécuyer ©)

Le Parc national des Cévennes est le partenaire privilégié de cet ambitieux projet. Deux agents de terrain de cet organisme public (Jean Bonnet et Jean-Louis Pinna) furent de tous les lâchers et assurèrent avec Contant Bagnolini, permanent du FIR à cette époque, la prospection et le suivi des couples reproducteurs. C’est Jean-Louis Pinna qui eut le courage de relever le défi de descendre dans toutes les aires de vautours afin d’y baguer les poussins. Le mot courage n’est pas trop fort, car pour avoir le privilège et l’honneur de l’accompagner dans cette mission depuis quelques années, je peux affirmer que les falaises des Causses, souvent surplombantes, sont véritablement très impressionnantes !
De plus, au-delà des aspects purement techniques, Jean-Louis ajoute à cette mission une note poétique indéniable. Cet homme, coureur des bois, a un sens de la falaise et de la recherche du meilleur itinéraire qui donne toujours l’impression que la chose est facile. Une harmonie certaine se dégage de sa personne pendant l’action et les journées passées avec lui dans ces belles parois caussenardes, parfois avec la peur au ventre, resteront à jamais gravées dans ma mémoire…

Le suivi de la reproduction

Avant de prétendre pouvoir descendre dans une aire de vautour pour baguer le poussin, encore faut-il savoir à quelle date l’opération peut se dérouler sans dommage pour le jeune oiseau. C’est le suivi de la reproduction qui permet d’obtenir cette information très importante. Dès le début de la saison, tous les nids connus sont contrôlés régulièrement et les secteurs de falaises propices à la nidification de cette espèce sont prospectés. Ainsi les dates de début d’incubation sont connues et éventuellement affinées avec l’observation de la présence des premiers poussins. Parfois, lorsque deux nids sont très proches l’un de l’autre et que les couples respectifs n’ont pas pondu tout à fait en même temps, il faut déterminer au mieux la date de descente. Il faut éviter de baguer un poussin trop jeune et surtout ne plus descendre s’il est trop âgé ! Ce dernier pourrait en effet se jeter dans le vide alors qu’il ne peut encore voler…


Jean-Louis Pinna au cours d'un baguage (photo : P. Lécuyer ©)

La technique utilisée

Pour accéder à l’aire du vautour, la technique pratiquée en spéléologie, dite sur corde simple, est utilisée (seuls 2 nids sont atteints en escalade). Un aspect non négligeable quant au bon déroulement de l’opération consiste en la découverte du bon itinéraire sur le plateau avant la descente proprement dite. En effet, connaître l’emplacement du nid est une chose, se retrouver juste à l’aplomb en est une autre !
La corde solidement amarrée à un pin sylvestre, l’aventure commence. Afin d’éviter les frottements de la corde sur le rocher, il faut la réamarrer chaque fois qu’elle risque de toucher la paroi. De plus le poids de l’équipier sur la corde pourrait desceller des pierres en équilibre, toujours présentes en milieu non aseptisé…ce qui est à proscrire bien évidemment ! Les alpinistes bagueurs progressent sur la corde à l’aide d’un descendeur, le long des grandes parois grises et ocres dans une ambiance fantastique. Les bombements surplombants sont évités et pour cela, la technique de fractionnement (où la corde est réamarrée) permet de suivre le cheminement adéquat qui mènera au nid. Parfois, la présence d’un arbuste accroché à la falaise rend possible l’utilisation d’une déviation, c’est à dire que la corde est simplement passée dans une sangle avec un mousqueton et déviée de sa trajectoire. Le nid atteint, parfois après des traversées impressionnantes, le moment passé en présence du jeune vautour est toujours fort ! Dans de rares cas un adulte reste à l’aire et se fait menaçant… mais il est bien vite écarté ! Le poussin est souvent stressé mais pas toujours, ce qui donne lieu d’ailleurs à de petits moments d’émotion avec le jeune oiseau posé sur ces tarses en train de s’épouiller ou de becqueter la manche du bagueur ! Quelques mesures bio métriques sont réalisées ainsi qu’un prélèvement de 2 petites plumes de contour. Le baguage et les différentes opérations terminées, la remontée peut s’effectuer. Il faut ici changer de matériel et utiliser des bloqueurs. Ces appareils glissent sur la corde dans le sens de la montée mais bloquent dans celui de la descente. Judicieusement positionnés sur le harnais et déplacés alternativement, ils permettent la remontée.


Philippe Lécuyer au cours d'une descente (photo : J.L. Pinna ©)
Une astuce pour avoir l’aire…

Les falaises caussenardes, outre leur hauteur pouvant dépasser les 140 mètres, ont la particularité d’être assez souvent surplombantes ! Cette caractéristique assure une bonne protection aux couples nicheurs se trouvant plus ou moins abrités des intempéries. Par contre, lors des descentes pour atteindre les nids, les bagueurs se retrouvent vite à deux ou trois mètres de la paroi… Pour remédier à cet inconvénient, Jean-Louis a eu l’idée d’utiliser une canne à pêche ! En fait, le principe d’utilisation est simple mais il fallait y penser. La canne, télescopique, est parcourue par une cordelette qui se termine par un crochet dit à « goutte d’eau », bien connu des grimpeurs. Se balançant devant le nid, le candidat au baguage développe la canne et essaie de fixer le crochet sur le bord de l’aire. Ensuite, il replie l’instrument tout en maintenant la cordelette tendue. Il n’y a plus qu’à se tirer dessus pour atteindre le nid, et le tour est joué… Plus facile à écrire qu’à réaliser, pendu à 60 ou 70 mètres de hauteur dans une falaise faisant le double !
Sur les sentiers de corniches menant aux parois, plus d’un randonneur a dû se poser la question : « mais que font-ils avec une canne à pêche ici ?… »


Philippe Lécuyer avec un jeune vautour fauve (photo : J.L. Pinna ©)

Les applications scientifiques

Les applications liées au baguage sont de plusieurs ordres :
  • Identification des individus. Dans le cadre d’un programme de réintroduction, connaître si les oiseaux lâchés sont toujours présents est bien sûr d’un intérêt majeur.
  • Le suivi d’individus marqués permet également d’estimer des paramètres démographiques de survie et de reproduction et donc d’apprécier le taux d’accroissement d’une population. Des modélisations mathématiques permettent ensuite d’envisager l’évolution ou la viabilité d’une population. Dans le cadre du programme caussenard, une thèse de doctorat, soutenue par François Sarrazin au début des années 90, a découlé de ces données accumulées depuis une dizaine d’années.
  • Des informations sur les déplacements sont accessibles également. Deux vautours fauves nés dans les Grands Causses sont allés jusqu’au Sénégal (info CRBPO), à plus de 3000 kilomètres de leur colonie, un autre est allé jusqu’en Lettonie occidentale ! Une information récente nous apprend qu’un vautour né en 1999 dans les Gorges de la Jonte a passé presque 2 ans en Espagne avant de revenir dans sa colonie d’origine.
  • Des données sur la longévité de ces oiseaux dans la nature sont obtenues. Un vautour fauve célèbre dans les Causses et cher à Jean-Louis, j’ai nommé Condor, est mort à l’âge respectable de 35 ans !
  • Enfin, l’âge de première reproduction chez cette espèce a été découvert et un cas est connu ou une femelle est âgée de seulement 3 ans !

Voilà la petite histoire du baguage des vautours fauves caussenards. Avant tout, l’histoire d’un homme, d’une passion et surtout d’une grande volonté de la chose bien faite. Jean-Louis a su marier la rigueur et la technique, qui s’est affinée au cours des années, à la simplicité et à la poésie. Je me souviendrai toujours de ces journées avec lui, magnifiques, au mois de mai, dans les senteurs exaltées et les chants d’oiseaux du printemps caussenard de nouveau installé.
L’auteur de ces bien modestes lignes lui doit des moments parmi les plus fabuleux d’une existence.